« Notre chien est incontrôlable et agressif… : On nous dit que
c’est un dominant !! »
La forme catégorique de cette assertion assénée comme une vérité
incontournable, induit qu’il n’y aurait que la revendication de
dominance pour expliquer qu’un chien est difficilement
contrôlable ou même agressif.
C’est faire là une bien courte analyse… !
« C’est à peine si nous pouvons recevoir tellement notre chien
aboie dès qu’un visiteur s’annonce et entre à la maison. Il
saute tout de suite sur tout le monde, nous grogne dessus si
nous voulons l’en empêcher, et ne laisse plus la paix à personne
tant que nos invités sont là. Il a les mêmes comportements en
promenade dans les rencontres avec ses congénères, il n’obéit
pas, il est incontrôlable et agressif : c’est un dominant !»
A peine caricatural, cet instantané de relations avec un chien
est des plus courant, et pour leurs propriétaires, penser qu’ils
ont « un dominant » devient un état de fait immuable, comme un
coup du sort d’être tombé justement sur cet animal là !
C’est faire une bien courte analyse que de cataloguer comme
« dominant » un chien que l’on peine à contrôler, ou encore
comme « dominant agressif » un animal qui aboie et grogne sur sa
famille ou veut agresser ses congénères en balade.
Masquant avant tout que les choses peuvent être un peu plus
nuancées, les aspects réducteurs et fatalistes de cette analyse
donnent à penser que l’on ne pourra rien changer à rien, un peu
comme si de ce chien noir on voulait en faire un chien blanc !
Si la couleur d’un chien dépend entièrement de sa génétique, il
n’en est rien à propos de la dominance.
Il y a bien sûr des races (plutôt les molossoïdes) parmi
lesquelles on remarque que les mâles sont très sourcilleux avec
leurs congénères du même sexe (les femelles leur disputant
parfois cette réputation)
Ils sont les plus prompts à aller « s’expliquer » de manière
musclée dans les rencontres en balade. Cependant une bonne
socialisation aux congénères, consciencieusement menée depuis le
plus jeune âge, doublée d’une relation clairement organisée
autour de règles de vie rigoureuses, tempère beaucoup ces
intolérances et façonne un chien tout à fait contrôlable, même
de ce type de races.
Entre canidés, la dominance est toujours fonction des intentions
l’autre, de sa volonté ou non de ne pas s’en laisser imposer.
Ainsi tel chien pourra très bien dominer celui-là et à l’inverse
être dominé par celui-ci, qui se trouvera avoir plus fortes
assurance et détermination que lui autour de telle ou telle
ressource. Entre chiens ces questions
se règlent le plus souvent pacifiquement. Regards, flairages
permettent à chacun d’évaluer la détermination de l’autre à
vouloir s'imposer, encore faut-il qu’ils soient pour
cela libres de leurs mouvements.
Beaucoup de chiens toujours tenus en laisse ne peuvent même pas
se mesurer avec des congénères et s’ajuster interactionnellement
lors de rencontres. Ils en sont empêchés par ce lien tenu
généralement fermement par des propriétaires souvent inquiets et
malhabiles. L’animal se sent vulnérable, et grogne ou aboie pour
freiner toute approche, à laquelle il ne pourra pas faire face
en toute possession de ses moyens naturels.
Moyens naturels permettant de s’adapter à toute éventualité, et
qui sont ceux de :
-
l’immobilisation,
le temps de jauger le type d’approche, amicale ou offensive de
l’autre
-
ou la
fuite, s’il lui semble que l’autre a des intentions
belliqueuses et qu’il ne tient pas à l’affronter
-
ou bien
encore l’attaque, s’il se sent au contraire tout a fait
prêt à s’imposer
Les chiens qui ne sortent pas souvent de leur jardin ne sont pas
des plus à l’aise non plus avec leurs congénères par manque de
familiarisation, et accumulent même pour certains comme une "volonté d’en découdre" avec le premier venu croisé en balade!
C’est pourtant, surtout et avant tout par peur, que
nombre de ces chiens promptement qualifiés de « dominant »
menacent leurs congénères en grognant et aboyant ou les
agressent en sautant et mordant. Cette émotion demeurant la plus
mal reconnue, principalement par les propriétaires de chiens de grandes races.
Comme exposé plus haut, certains autres chiens sont catalogués
de « dominants » parce qu’agités et désobéissants à la maison,
autant que difficilement contrôlables en balade.
Sans forcément revendiquer la dominance, un chien peut avoir de
bonnes raisons de ne pas répondre (couramment les humains
appellent cela désobéir) à une demande ou un ordre de ses
propriétaires : soit il ne peut pas, soit il ne veut pas...
-
S’il ne
peut pas : c’est peut-être qu’il ne comprend pas, ou qu’il a
peur…
-
S’il ne
veut pas : c’est peut-être qu’il a fait précédemment une
mauvaise expérience de ce qui lui est demandé, ou que
simplement il n’en a pas envie ! alors pourquoi pourrait-il
n’en avoir pas envie… ?!
Comme beaucoup le pensent, le chien n’obéit pas exactement pour
faire plaisir à son propriétaire, mais plutôt pour le plaisir
que lui procure un propriétaire gratifiant quand il est lui-même
satisfait. Dans la même optique, l’animal ne désobéit pas pour
« embêter » son humain mais plutôt parce que celui-ci
n’aura pas su assez le motiver, en lui montrant qu’il pouvait
être agréable de lui être attentif !
Tellement de chiens attendent qu’il leur soit simplement offert
de trouver les bonnes manières de se comporter.
Il est vrai qu’il manque des centres (professionnellement gérés)
ou chiots et chiens pourraient s’exercer en toute liberté à
parfaire leur socialisation, pour qu’ils expérimentent avec
leurs propriétaires
qu’il n’y a pas que des risques à fréquenter des congénères.
Mais il manque aussi une réelle prise de conscience que le chien
est d’une espèce différente de la nôtre, qu’il a des codes
sociaux et de communication qui lui sont propres et que son
intégration dans la famille nécessite qu’il en soit tenu compte.
Accaparés par une recherche éperdue de repères stables et de
limites constructives, beaucoup de chiens n’attendent que des
propriétaires instruits de ce qui fait leur équilibre comportemental,
et qui ne se contentent pas d’en rester aux idées reçues.
Quelques règles de vie non changeantes au gré des humeurs et des
emplois du temps des différents membres de la famille, offrent
déjà un bon début dans ce sens. On peut poursuivre ensuite
en s’interrogeant sur ce qui dans la relation peut induire un
comportement inattendu du chien et surtout se demander comment
va-t-on y réagir.
Les Caniconsultant(e)s étant bien sûr disponibles pour
éclairer sur les bonnes bases de relations harmonieuses avec un
chien, et ce avant toute acquisition d’un chiot ou bien quand
rien ne va plus avec le chien de la famille.
Texte publié dans le magazine "Atout
Chien" n° 229
Danièle
Mirat - Caniconsultante |