-
Frisco le caniche scandalise sa propriétaire quand il « s’empresse »
(me dit celle-ci) sur tout congénère qui passe ! « Les femelle,
d’accord je comprends, mais il a les mêmes ardeurs pour les
mâles !! »
- Jean
Louis me confie que Ulk son Rottweiler « veut culbuter » les
visiteuses gênées autant qu’effrayées qui arrivent chez lui.
-
Embarrassée, la propriétaire de Toffy le Golden me dit que son chien
essaie parfois de « l’attraper » surtout quand son mari
s’absente !
- Les
propriétaires de Suzy la Cocker la surprennent « s’acharnant » sur le
chat ou sur Simon leur petit bambin !
-
Tokie la femelle Pinscher chevauche
Siloue
l’autre petite
Pinscher
et ce plusieurs fois par jour !
-
Tyrex le Boxer « s’active » sur son panier tous les soirs devant
tout le monde !
Que de
personnes gênées et de détours langagiers pour décrire ces situations
qui embarrassent au quotidien tant de propriétaires de chiens, qui
se méprennent sur la signification de ces comportements.
Que
d’anthropomorphisme, de réflexions fantaisistes et
d’interprétations erronées à propos de ces conduites de leurs
chiens, qu’ils interprètent comme sexuelles !
Les
canidés sont actifs sexuellement quand ils sont motivés par
l’instinct de reproduction et seulement aux 2 périodes annuelles
de chaleurs des femelles. Les mâles, eux disponibles il est vrai
toute l’année, sont alors fortement stimulés (jusqu’à se mettre en
danger) par les odeurs particulières qu’elles dégagent. La
recherche mutuelle d’accouplement est alors légitime et commandée
pour la survie d’une espèce.
L’être
humain, lui, est sexuellement actif tout au long de l’année et
n’est pas pour cela uniquement motivé par le besoin de
reproduction ! bien loin de là !! Voyant
le chien de la famille si souvent animé du désir de chevaucher le
chat, ses congénères ou même les humains, et en déduire que lui
aussi est motivé par une recherche de plaisir ne serait donc
qu’anthropomorphisme.
En
dehors des périodes d’oestrus des femelles, il est courant chez
les canidés d’observer ces chevauchements qui ont alors une valeur
sociale. Les chiots les plus déterminés d’une portée, très tôt et
bien avant leur puberté, expriment déjà de cette manière leur
besoin de communiquer.
Frisco,
Ulk et les autres chevauchent donc congénères, humains ou coussins
sans que l’enjeu de ce comportement soit la sexualité.
En
mimant un pseudo accouplement, nullement « obsédés par la
chose » ! ni homosexuels ! ces chiens mâles ou femelles expriment
dans les situations décrites plus haut, leur désorientation dans
l'organisation de leur cohabitation avec les humains.
Sauf
si -comme dans le cas de Frisco le caniche- on ne peut plus
croiser un chien sans qu’il soit aussitôt l’objet des ardeurs
pseudo-sexuelles de votre compagnon, il n’y a aucune raison de ne
pas les laisser régler entre eux ces aspects de communication canine.
Ulk le
Rott veut donc gérer toutes les petites amies de Jean Louis, non
pas parce qu’il est sensible à leur charme ! mais parce qu’il
cherche quel contrôle il pourrait trouver sur l’espace où il vit, y compris sur
les êtres qui le peuplent ou le traversent.
Et
c’est là qu’il y a problème ! car bien sûr ces comportement
indésirables, outre qu’ils sont particulièrement gênants pour le
propriétaire et surtout pour les visiteuses ! peuvent devenir
dangereux au niveau de la désorientation de l’animal.
Ulk
est dans un système relationnel mal géré par sa famille qui ne
se rend pas compte qu’en n'établissant pas une meilleure
communication avec l'animal, il y a dangerosité potentielle dans
leur cohabitation. Et de plus, Ulk montre aussi des conduites agressives vis-à-vis de ses
congénères croisés en promenade, qu’il menace ou/et agresse
copieusement pour les mêmes raisons.
Les
propriétaires de ces chiens sont souvent conduits à envisager la
castration qui leur est proposée, pour tenter de réduire ces
comportements indésirables de l’animal.
Certes
le chien sera alors bien moins sensible aux odeurs des femelles en
chaleur, et (un peu) moins en compétition avec les congénères
mâles en balade. Mais cela ne réglera rien du problème de fond qui
n’a rien à voir avec la sexualité mais avec la communication.
Chevauchements (et conduites agressives possibles chez les plus
déterminés si l’on s’y oppose) seront toujours les seuls messages
canins de Ulk, Toffy, Frisco et les autres, pour dire leur malaise
social dans le groupe humain/chien.
Que
dire pour finir de Tyrex le Boxer avec son panier et de ce
singulier « partenaire » qui se « soumet » tous les soirs…! Tyrex
aussi exprime son malaise, mais de manière moins
directe.
D’abord parce que ses propriétaires l’ont fermement découragé très tôt
de monter sur leurs jambes, mais sans pour autant lui proposer
les échanges quotidiens mieux structurés, dont il aurait eu
besoin.
Ensuite parce qu’étant chiot et dès qu’il s’est exercé à cette
activité sur son panier, tout le monde a trouvé cela « si
craquant de la part d’un si petit ! » Quel
renforcement maladroit !
Tyrex
est donc aujourd’hui assez inhibé pour ne pas oser par exemple
(comme Toffy le Golden) chevaucher sa propriétaire, mais pas assez
pour rediriger ses tensions vécues au quotidien dans son
relationnel jusque .... sur son
panier.
On
comprend que toutes ces conduites sont éléments de communication
et que si l’on veut les voir s’atténuer et disparaître, il y aura
lieu de réorganiser la relation au sein du groupe familial.
Il ne
s’agira pas tant d’utiliser les méthodes du conditionnement en
contraignant l’animal avec un dressage, mais bien plutôt de mettre
en place justement une bonne communication!
Le
chien retrouvera non seulement des comportements plus acceptables
socialement, mais aussi une tranquillité émotionnelle bien plus
propice à son bon équilibre et sa bonne santé générale.
Danièle Mirat - Caniconsultante
Texte publié dans le magazine "Santé Pratique Animaux" n°17
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